Le Mauvais Vitrier - Wikisource
C'est dans une même atmosphère dangereuse, observons-nous, que flottent les nouvelles d'Edgar Poe sachant quel rôle jouait la logique dans l'oeuvre du poète de Boston et quelles jouissances Baudelaire en tirait. Dans Fusées, le lecteur attentif relève: « De Maistre et Edgar Poe m'ont appris à raisonner ». Le mauvais vitrier lyon. Par là, le poète entendait révéler les anomalies (et les pièges) de la pensée. À cet antipositivisme affiché, vient en manière de contrefort, un autre poème, Le Mauvais vitrier, qui tente de décrire, cette fois, une anomalie de comportement: en fin de compte quelque chose qui échappe à la raison et aux élucubrations de la logique. La démarche du poème aboutit à mettre en exergue l'inconnu, le gouffre qu'il y a en chaque homme - et par là les propres limites du domaine de la logique. Il est tout à fait remarquable de constater le voisinage des champs lexicaux qui convergent vers le point central de la spéculation et le méconnaissable (« inconnu, mystérieux... ») qui font confiner le poème à la métaphysique, et opérer ironiquement un retour de l'état positif à l'état conjectural, pour reprendre la terminologie de Comte; « soif insatiable de tout ce qui est au-delà!
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Lorsque paraît pour la première fois le poème « Le mauvais vitrier » en 1862 dans La Presse, la renommée de Charles Baudelaire n'est plus à faire depuis longtemps. Cinq ans le séparent déjà du procès des Fleurs du mal, l'essentiel de son travail de traduction des textes de Poe a été complété et le poète a déjà commencé, par le biais de la critique de l'œuvre du génie américain, à développer un discours sur « la Perversité naturelle68 ». Parmi toutes les pièces – en prose ou en vers – de l'auteur, ce poème tardif a une valeur manifeste d'exemple en ce qui a trait à ce sujet et il s'avère en conséquence tout à propos de commencer à poser la question de la perversité baudelairienne à partir de ce dernier. Rappelons dans un premier temps la fable du poème. Un narrateur interpelle du haut de sa fenêtre un vitrier au « cri perçant69 » (OC, 1, 286). IX. Le mauvais Vitrier – Français 322: Introduction à la littérature moderne (Gipson). Il le fait monter jusque chez lui avec, bien sûr, son chargement de vitres, pour ensuite le chasser sous prétexte qu'il n'a « pas même de vitres qui fassent voir la vie en beau » (OC, 1, 286).
Il me serait d'ailleurs impossible de dire pourquoi je fus pris l'gard de ce pauvre homme d'une haine aussi soudaine que despotique. "- H! h! " et je lui criai de monter. Cependant je rflchissais, non sans quelque gaiet, que, la chambre tant au sixime tage et l'escalier fort troit, l'homme devait prouver quelque peine oprer son ascension et accrocher en maint endroit les angles de sa fragile marchandise. Enfin il parut: j'examinai curieusement toutes ses vitres, et je lui dis: "Comment? vous n'avez pas de verres de couleur? des verres roses, rouges, bleus, des vitres magiques, des vitres de paradis? Impudent que vous tes! Le mauvais vitrier poeme. vous osez vous promener dans des quartiers pauvres, et vous n'avez pas mme de vitres qui fassent voir la vie en beau! " Et je le poussai vivement vers l'escalier, o il trbucha en grognant. Je m'approchai du balcon et je me saisis d'un petit pot de fleurs, et quand l'homme reparut au dbouch de la porte, je laissai tomber perpendiculairement mon engin de guerre sur le rebord postrieur de ses crochets; et le choc le renversant, il acheva de briser sous son dos toute sa pauvre fortune ambulatoire qui rendit le bruit clatant d'un palais de cristal crev par la foudre.
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Il me serait d'ailleurs impossible de dire pourquoi je fus pris à l'égard de ce pauvre homme d'une haine aussi soudaine que despotique. « – Hé! hé! » et je lui criai de monter. Cependant je réfléchissais, non sans quelque gaieté, que, la chambre étant au sixième étage et l'escalier fort étroit, l'homme devait éprouver quelque peine à opérer son ascension et accrocher en maint endroit les angles de sa fragile marchandise. Enfin il parut: j'examinai curieusement toutes ses vitres, et je lui dis: « – Comment? Le mauvais vitrier les. vous n'avez pas de verres de couleur? des verres roses, rouges, bleus, des vitres magiques, des vitres de paradis? Impudent que vous êtes! vous osez vous promener dans des quartiers pauvres, et vous n'avez pas même de vitres qui fassent voir la vie en beau! » Et je le poussai vivement vers l'escalier, où il trébucha en grognant. Je m'approchai du balcon et je me saisis d'un petit pot de fleurs, et quand l'homme reparut au débouché de la porte, je laissai tomber perpendiculairement mon engin de guerre sur le rebord postérieur de ses crochets; et le choc le renversant, il acheva de briser sous son dos toute sa pauvre fortune ambulatoire qui rendit le bruit éclatant d'un palais de cristal crevé par la foudre.
Et la question rhétorique finale Qu'importe? [... ] Le brouillage du sens Ce texte n'est pas dénué d'humour: Baudelaire joue avec le lecteur. Poème Le Mauvais Vitrier - Charles Baudelaire. En fait, le narrateur tient toutes les ficelles et trouble les codes: présenté de façon pathétique, le vitrier n'est en fait qu'une figure vide, celle de l'homme l'homme devait éprouver enfin il parut quand l'homme reparut et il ne trahit aucune émotion- excepté un grognement.
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Le vitrier peut donc incarner tout ce qui s'oppose à l'activité poétique. En cela, on peut le considérer comme une projection du poète, mécontent de lui-même. Le Mauvais Vitrier - Wikisource. Néanmoins, le texte crée un malaise, qui naît peut-être du décalage entre les explications possibles d'une telle attitude (soit des pulsions irrationnelles, soit l'amour de l'art) et le ton sur lequel sont données, marqué par la neutralité, la maîtrise, l'indifférence. ]
— Pourquoi? Parce que… parce que cette physionomie lui était irrésistiblement sympathique? Peut-être; mais il est plus légitime de supposer que lui-même il ne sait pas pourquoi. J'ai été plus d'une fois victime de ces crises et de ces élans, qui nous autorisent à croire que des Démons malicieux se glissent en nous et nous font accomplir, à notre insu, leurs plus absurdes volontés. Un matin je m'étais levé maussade, triste, fatigué d'oisiveté, et poussé, me semblait-il, à faire quelque chose de grand, une action d'éclat; et j'ouvris la fenêtre, hélas! (Observez, je vous prie, que l'esprit de mystification qui, chez quelques personnes, n'est pas le résultat d'un travail ou d'une combinaison, mais d'une inspiration fortuite, participe beaucoup, ne fût-ce que par l'ardeur du désir, de cette humeur, hystérique selon les médecins, satanique selon ceux qui pensent un peu mieux que les médecins, qui nous pousse sans résistance vers une foule d'actions dangereuses ou inconvenantes. ) La première personne que j'aperçus dans la rue, ce fut un vitrier dont le cri perçant, discordant, monta jusqu'à moi à travers la lourde et sale atmosphère parisienne.